Mon retour de prison
La première fois où je suis sorti de prison en liberté sous caution, mon père est venu me chercher à la prison et m’a ramené chez moi. Il avait neigé et il y avait presque 2 pieds de neige dans ma grande entrée. Nous nous sommes stationnés sur le bord de la rue.
C’est la première fois que je voyais ma maison depuis mon arrestation. Tout était en l’envers. Quelqu’un avait défoncé la porte au sous-sol et on m’avait volé mes appareils électroniques; télévisions, systèmes de son de ma chambre et mon bureau, téléphone, etc.
La GRC avait enlevé toutes les tuiles du plafond au sous-sol et vidé toutes les bibliothèques (j’avais plus de 1000 livres). Ça trainait partout.
La porte d’entrée avait été remplacée mais un peu n’importe comment. Il y avait un gros espace tout le tour qui laissait entrer le froid. La porte de ma chambre à coucher et le mur en face étaient défoncés. La porte du sous-sol était ouverte et il y avait de la neige dans mon bureau.
Pendant mon absence la GRC avait confisqué un paquet de trucs par peur que je les vende en prétextant qu’ils étaient des produits de la criminalité. Ils avaient même pris le bain tourbillon extérieur!
Lorsque nous étions sur la route j’avais dit à mon père que je ne savais pas trop comment je ferais pour vivre. Je n’avais pas un sou et, avec tout le battage médiatique que la GRC avait fait, je ne croyais pas que quelqu’un m’offrirait un emploi. Il m’avait répondu de ne pas m’inquiéter, que c’était réglé. Je me disais qu’il m’avait peut-être trouvé un emploi ou autre chose.
Ben oui c’était réglé, mon père avait fouillé partout et trouvé environ 300$ dans une armoire de cuisine. Vraiment je ne le comprenais pas. C’était un comptable, il devait bien savoir que je ne vivrais pas longtemps avec 300$. Ça me coûtait presque ça par mois pour l’électricité l’hiver.
Il est parti et je me suis retrouvé seul. J’étais content de ne plus être en prison mais là il fallait que je fasse face à la situation. C’était le bordel dans la maison. Je n’avais rien à manger. Je ne pouvais pas regarder la télé car elles avaient été volées. Je ne pouvais pas écouter de musique. Je n’avais pas d’ordinateur.
C’était un moment difficile. Je regardais autour de moi et je ne savais pas par quoi commencer. Je ne savais pas ce qu’il fallait que je fasse.
J’ai regardé par la fenêtre et j’ai remarqué que la souffleuse pour la rue était en train de passer. Je me suis dit : « Bon, encore plus de neige qui se retrouvera dans mon entrée et que j’aurai à pelleter. » Le conducteur a dû remarquer que j’étais chez moi par les pas dans la neige ou en me voyant par la fenêtre. Je suis sûr que tout le monde dans le village était au courant de mon histoire. Ce monsieur a décidé de déneiger mon entrée avec la souffleuse de la municipalité. Je pleure encore aujourd’hui juste d’y penser. Après 80 jours à me faire traiter comme de la merde, il y avait quelqu’un que je ne connaissais pas du tout qui me donnait un coup de main, qui me redonnait un peu de confiance dans la société.
Je m’attendais au contraire mais, dans les mois qui ont suivi, j’ai remarqué que mes voisins et les autres gens avec qui je faisais affaire étaient toujours gentils avec moi.
Je lis ton blog depuis quelques années et la perspective que tu nous donnes du milieu carcéral et de la vie après est vraiment intéressante. Continue comme ça, c’est toujours un plaisir de te lire.
Merci! C’est très gentil.