Le jugement après la prison
Je voulais écrire un petit texte à propos de quelque chose qui commence à me peser.
Je savais, en sortant de prison, que j’aurais des problèmes parce que j’avais fait de la prison.
Je savais que je subirais le jugement des gens.
Par contre je croyais qu’après 18 mois de liberté, ce serait pas mal réglé. J’aurais un emploi, des amis et peut-être une amoureuse.
Les choses ne se passent pas aussi simplement que je l’aurais voulu. Des gens diront que c’est ma faute, que je devrais sortir plus, etc. C’est vrai que je n’ai pas beaucoup de talent pour les relations sociales. Ça me demande un effort. Il y a aussi qu’il est difficile de trouver de l’emploi dans mon domaine. L’économie a ralenti, le gouvernement a coupé l’embauche et tous les dérapages qu’il y a eu dans la consultation dernièrement fait qu’il se donne moins de gros contrats qu’avant. Je travaille à la pige alors je reste toujours à la maison et ne rencontre personne.
Ça devient difficile lorsqu’il faut que j’explique ce qui m’est arrivé et qu’on ne me croit pas trop. Je donne des arguments mais souvent les gens ne croient pas ce que je raconte. Je l’ai souvent vécu en prison où les gens me laissaient parler jusqu’à je leur montre mes papiers. Tout à coup les gens me demandaient ce que le juge avait dit lorsqu’il avait vu toutes ces preuves que j’avais. Malheureusement aucun juge ne les a vus.
Je prends conscience qu’on ne me juge pas sur ce que je suis ou ce que j’ai fait. On me juge pour ce qu’on m’a fait. Une femme m’avait écrit sur reseaucontact malgré que j’aie écrit que j’avais fait de la prison. Comme à peu près tout le monde, elle a demandé pourquoi j’avais fait de la prison. Je l’ai envoyé voir ce site. Voici sa réponse:
je ne suis pas sûre que j’ai envie de m’engager avec tout ce qui t’es arrivé.
Ce qui m’est arrivé fait peur aux gens. Ce n’est pas la première fois que quelqu’un m’écrit quelque chose de ce genre. C’est comme si j’étais pestiféré. C’est comme si avoir des problèmes était une maladie contagieuse.
Je n’en veux pas aux gens d’agir ainsi, ils ont leurs raisons et c’est peut-être mieux ainsi.
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Quand je suis sorti de prison j’avais avisé les gens des libérations conditionnelles qu’il se pouvait que je donne des entrevues avec des journalistes pour expliquer ma version des faits, surtout si je ne trouvais pas d’emploi rapidement. Je me disais que peut-être quelqu’un se dirait que j’avais l’air de quelqu’un d’articulé et qu’on m’offrirait un emploi pour me donner une chance. On me l’a fortement déconseillé. « On ne peut t’empêcher de parler aux journalistes mais il faudra en subir les conséquences ». Je ne savais pas trop quoi faire de ce genre de menaces voilées. J’ai mis ça de côté pour l’instant.
Mais de plus en plus je sens que je serais plus heureux en ne restant plus dans l’ombre. Il me semble que j’ai des choses intéressantes à dire. J’ai appris beaucoup et j’ai envie de le partager. Je crois humblement pouvoir inspirer de belles choses.
Mais il y a cette liberté conditionnelle qui me met des bâtons dans les roues. Si je veux faire la moindre chose en dehors du « standard » c’est la croix et la bannière pour expliquer pourquoi je veux le faire et on dirait que ces gens n’ont pas le cerveau construit comme le mien. On ne parle pas le même langage.
J’y ai songé sérieusement et je suis sur le point de contacter des journalistes. J’ai déjà accordé des entrevues à certains d’entre eux lorsqu’ils en avaient besoin à propos de quelqu’un que je connaissais. On verra s’ils seront toujours intéressés par mon histoire.
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Un homme m’a contacté dernièrement après avoir vu ce site. Il venait de faire quelques jours de prisons et ça l’a éveillé sur ce monde parallèle qu’il ne connaissait pas. C’est un gestionnaire d’une très grande entreprise et il m’offrait un poste. Malheureusement ce n’est pas dans mon domaine et comme je travaille déjà, le besoin n’est plus aussi pressant. C’était quand même gentil de sa part et ça me confirme qu’il y a des gens qui ne me jugeraient pas sur ce qui m’est arrivé. Il faut seulement leur donner une chance de me connaître. Et pour ça il faut que je sorte un peu plus .
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