Le « docteur » de la prison
Lorsque je suis arrivé à la prison de Moshannon Valley aux États-Unis il y avait un québécois (Frank) dans mon secteur qui m’a expliqué un peu comment ça fonctionnait. Le même soir, un latino a remarqué que je n’avais pas encore mes vêtements et est venu me donner une paire de pantalon court (short). Frank m’a dit que tout le monde appelait ce détenu « docteur ». Quand je lui ai demandé pourquoi, il m’a dit qu’il m’expliquerait une autre fois.
Sur la photo ci-haut, vous pouvez voir de quoi avait l’air la section des toilettes. Nos toilettes étaient en porcelaine mais on n’avait pas de siège. On s’assoyait directement sur la porcelaine mais c’est quand même beaucoup moins froid que l’acier inoxydable. C’était très près des lits et il y avait des rideaux qu’on pouvait déployer autour de nous.
Ça faisait quelques jours que j’étais là lorsque j’ai remarqué un soir qu’il y avait deux gars aux toilettes qui étaient debout face à face (on voyait leurs pieds). C’était juste à côté du lit de Frank et je lui ai demandé ce qui se passait. Peut-être les gars s’embrassaient?
C’est là que j’ai appris la chose la plus étonnante depuis mon incarcération. C’est une des choses de la prison, quand on croit qu’on a tout vu, quelque chose de pire arrive. Frank m’a expliqué que les gars se faisaient installer des « perles » dans le pénis. J’avoue avoir été découragé pendant quelques minutes. Je me disais : « Ça y est, ils ont fini par m’envoyer à l’asile ».
Il y avait tout un processus qui impliquait beaucoup de gens :
- Un gars qui faisait les « perles ». Il cassait un domino et le sablait pendant des heures pour qu’il devienne rond. Il le polissait ensuite sur une ceinture de tissu. Il faisait aussi des perles doubles. Ça devait être plus cher je suppose.
- Un autre aiguisait le manche d’une brosse à dent. Encore là c’était long car il fallait que ce soit très pointu et lisse.
- Le « docteur » qui insérait les perles.
- Quelqu’un qui surveillait pour les gardiens durant « l’opération ».
Il y avait donc des gens dans les secteurs qui travaillaient à faire des perles ou d’autres choses non permises (faire des exercices avec des poids improvisés etc.) C’est pourquoi qu’à chaque fois qu’un gardien entrait dans le secteur, un détenu faisait un cri spécial pour avertir qu’un gardien arrivait.
Il ne faut pas croire que c’était rare. C’était en fait très fréquent. J’ai connu quelques québécois qui l’ont fait faire mais c’était populaire surtout auprès des latinos.
Je vous avertis, des explications graphiques vont suivre. Je ne l’ai jamais vu, alors je ne fais que rapporter ce qu’on m’a dit.
Après avoir désinfecté ses « instruments », le « docteur » tirait la peau du pénis et perçait la peau jusqu’à traverser le pli qu’il avait fait. Ça faisait donc deux trous, le trou de sortie un peu plus petit. Il insérait la « perle » par le plus grand trou. Le plus petit trou laissait sortir l’air.
J’ai aussi entendu dire que certains « docteurs » utilisaient des lames de rasoir.
Par la suite il fallait faire attention pour ne pas trop manipuler son pénis pour ne pas que ça saigne, s’infecte ou que la perle ressorte. Comme c’était défendu de faire ça, les gars allaient à la clinique en dernier recours.
Pourquoi les gars faisaient ça? Il paraîtrait que les femmes aiment ça. Ils s’en faisaient installer plusieurs: sur le dessus, dessous, à l’avant, à l’arrière… Ils voulaient être sûrs de pogner le bon spot. J’ai entendu parler d’un gars qui en avait 14! Je ne sais pas où il a trouvé la place pour mettre tout ça. Ça devait pas être beau lorsqu’il sortait de l’eau froide. Ça devait ressembler à un sac de bines.
Il y avait deux québécois (appelons les Roger et Marco) qui étaient amis et qui avaient envie de l’essayer. Marco finissait sa sentence en premier et a décidé de se le faire faire. L’entente était que Roger appellerait Marco pour savoir si les femmes aimaient vraiment ça.
Un jour je marchais dans la cour avec André (un gars vraiment comique) et Roger est venu nous voir :
Roger : Je viens de parler à Marco au téléphone. Il a fini par essayer son nouvel « équipement » et la fille a dit que c’était merveilleux.
André : Avec qui il l’a essayé? (on savait que la femme de Marco l’avait laissé pendant qu’il était en prison)
Roger : Avec une prostituée. Pourquoi?
André : Alors ça doit être vrai. Elle a sûrement ajouté que c’était son meilleur. Et pour 50$ de plus elle lui aurait dit qu’elle l’aimait!
Ouf ! Faut vraiment être timbré pour se faire charcuter comme ça. Idem pour les femmes (ou les mecs) qui se font percer les seins ou le clito. Sans anesthésie parce qu’il n’y en a tout simplement pas. Sauf pour la langue : tu dois boire un produit qui la « gèle » avant que la personne ne la transperce avec l’aiguille.