À s’arracher les cheveux
Faute de travail, j’ai décidé de me remettre à mes procédures légales. Le changement de gouvernement fédéral va peut-être m’aider.
Malheureusement je dois lire des milliers de pages de documents. Ce n’est pas toujours de la lecture plaisante.
Parmi les documents que la GRC m’a donnés il y a longtemps, il y avait un compte-rendu de réunion des « employés ». J’ai déjà raconté que je m’étais retiré de cette entreprise en 2000 et que d’autres personnes l’avaient reprise. Dans ce compte-rendu on voit une description des tâches de chacun. Mon nom n’y est mentionné qu’entre parenthèses à côté du nom de la personne qui ferait le travail que je faisais auparavant. Il a aussi plusieurs autres affirmations écrites à la main (pas par moi, « intéressée » est au féminin) dont celles-ci:
- C’est moi qui prend les décisions
- Je suis intéressée à connaître votre opinion, mais ne pas s’attendre à ce que je fasse ce que vous me dites. Ne pas prendre ça personnel.
- But pour moi : que je travaille le moins possible, faire de l’argent.
Il y avait même une photo (un ancêtre du selfie) de ces gens ensemble dans l’entrepôt.
J’avoue que ce n’est pas facile à lire.
C’est moi qui aie fait plus de six ans de prison sans compter plus de quatre ans en liberté sous caution et trois autres années en liberté conditionnelle à la fin.
C’est moi qui n’aie pas d’emploi et qui est sur l’aide sociale alors que ces gens ont de bons emplois professionnels et « l’intéressée » a une belle grande maison.
C’est moi qui doit payer plus de six millions aux gouvernements fédéral et provincial ou qui doit se battre encore contre ces imbéciles.
C’est moi qui doit expliquer mon histoire et mes problèmes lorsque je rencontre quelqu’un ou qui doit être prudent avec les amis de ma copine car ils ne savent pas tous ce qui m’est arrivé.
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Je découvre aussi d’autres documents qui me fâchent.
Dans un document rédigé par un « gendarme », on lit qu’un montant dans un compte bancaire a été déposé lorsque je travaillais pour une compagnie de consultation et vient des revenus de ce travail. On a quand même décidé de le saisir.
Le crime qu’on m’accusait d’avoir enfreint aux États-Unis, n’existait là-bas que depuis mars 2000. On a pourtant saisi tout ce que je possédais même si ma maison avait été payée bien avant cette date et que j’avais environ 580,000$ à la banque à ce moment.
Lorsque j’étais en prison aux États-Unis j’ai écrit au Barreau pour obtenir une liste d’avocats qui pourraient m’aider. J’avais expliqué ma situation, c’était clair que j’étais en prison. On m’a répondu, par écrit, de consulter leur site web (à partir de la prison?)
J’ai eu un séjour à l’hôpital où on a perdu mon portefeuille et mes vêtements. Lorsque j’ai fait une réclamation, on m’a répondu que j’étais arrivé comme ça d’un autre hôpital (c’était un transfert). Je savais que ce n’était pas vrai mais je ne pouvais rien faire. En même temps je doutais de ma santé mentale. Ça ne se peut pas que tout le monde soit devenu con sauf moi. Une semaine plus tard une infirmière de cet hôpital (celui où j’étais supposément arrivé nu) m’a appelé pour me dire qu’elle avait trouvé mes choses dans une armoire. C’est rassurant de savoir que je n’étais pas fou mais ça use toute cette incompétence lorsqu’on a besoin d’honnêteté autour de soi.
J’avais demandé l’adresse de la Sûreté du Québec à mon consulat et j’ai dû faire une plainte à Ottawa pour finir par obtenir cette réponse :
Sûreté du Québec
Government of British Columbia
45 O’Connor St, Ottawa, ON K1P 5B7
Ben oui! La SQ fait partie du gouvernement de la Colombie Britannique et son adresse est à Ottawa. À ma connaissance la Sûreté du QUÉBEC n’est pas en Colombie Britannique et Ottawa n’est pas en Colombie Britannique non plus mais il était raisonnable de ma part de penser que j’avais maintenant basculé dans un monde parallèle où la « normalité » était un concept différent.
C’est sans compter les lettres de décision du syndic du Barreau que je recevais sans décision ou document. C’est assez bizarre de recevoir un document qui dit : « Voici notre décision » et qu’il n’y a rien d’autre.
Et le gendarme en charge de mes biens saisis qui m’écrit pour me dire que je suis responsable d’assurer la sécurité de ma maison. C’est pourtant suite à sa lettre à la compagnie d’assurance que celle-ci a résilié ma police. Je suis en prison aux États-Unis et il faudrait que j’assure la sécurité de ma maison. Ça a tellement pas de bon sens mais la cerise sur le sundae c’est lorsqu’il m’a écrit qu’il fallait que je m’assure que mon entrée soit toujours déneigée pour permettre aux pompiers de faire leur travail. Bien entendu la municipalité m’a écrit pour m’aviser qu’il fallait que je tonde mon gazon sinon je m’exposais à une amende de 100$ par jour.
Lorsque j’ai été transféré dans une prison canadienne, j’ai fait une demande à l’aide juridique de Laval pour obtenir certains services. J’avais des problèmes avec l’impôt et je voulais m’occuper de mon divorce. J’ai rencontré une avocate pour démarrer les procédures de divorce et un autre avocat devait venir me voir pour mes problèmes fiscaux. Un jour j’ai reçu la visite de quelqu’un de l’aide juridique pour m’aviser qu’aucun avocat de ce bureau ne pouvait me représenter. Il y avait conflit d’intérêt car ils avaient déjà représenté la femme de qui je demandais le divorce. Étais-je devenu fou? Mon ex-femme habite près de Québec (pas à Laval) et n’a jamais fait affaire avec l’aide juridique, peu importe la région.
Quelques fois je suis découragé de la race humaine.
Mais Michal m’a raconté son retour au Canada. Les officiers d’immigration l’ont accompagné dans l’avion et lui ont enlevé ses menottes. Son voisin de siège (un montréalais d’origine indienne, pas amérindienne) lui a demandé ce qui se passait et Michal lui a raconté son histoire. Son voisin lui a proposé son téléphone pour qu’il puisse appeler quelqu’un. Michal lui a dit qu’il aimait mieux attendre son arrivée. À l’aéroport de Montréal Michal lui a emprunté son téléphone pour vérifier si son ami l’attendait. Tout était OK. Michal a quand même marché avec son voisin pour se rendre aux douanes et celui-ci lui a donné son numéro de téléphone et lui a demandé de l’appeler s’il avait un problème et il reviendrait aussitôt pour l’aider.
Des gens comme ça me rassure un peu. Malheureusement ils sont rarement québécois de « souche ».
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